Le long chemin


Au bout du chemin
Je prendrai ta main

Il y a le long serpent de bitume
Sa lente somnolence
Ses mots sans regards
Qui m’étranglent peu a peu

Il y a la perfide injustice
De n’être pas du sexe qu il faut
La violence du déni sans guérisons
Des mots guillotines
Des fausses accusations
Des preuves que l on invente

Il y a ses joies fugaces
Que l on compte en heures
En instant parfois
Ses pas de deux avec les vagues
Dans le vent et le sable
Funambule du rester vivant

Il y a ceux qui sont partis
Coupables d aimer
Évadés de ces bagnes sournois
Prisons de la normalité
Dans le silence ou l’effroi
Ils en ont mal fini du pas des lois

Il y a ces photos voilées
Qui mesurent la triste distance
Du monde de verre et des grilles
Ou nous avons grandi
Entre les claquements des droits de visite
Qui s ouvrent ou se terminent

Il y a la volonté froide du tyran
Ses implacables mots d argent
Qui rappellent sans cesse
Sur nous son droit divin
Juridiquement consacré aux écuries de la reine

Il y a la sombre carapace
Des vertueux mensonges
Que enfant soldat défilant
Tu portes déjà en bouclier
Impossible d’y échapper

Il y a tes frères à moitié
Ceux en déni d’existence
Qui au fil de l eau
Les trop courts week-end
T’ont appris à nager
A courir, à pécher, à pédaler
A jouer ces notes bleues et carmins
Que l on improvise en tuant l heure du train qui revient trop vite

On m a volé ta vie de gribouilleur de manteaux
Tes premiers pas de cueilleur de groseilles
Tes rires aux pissenlits qui s envolent
Tes pleurs de testeur de bitume
Tes joies de faiseur de bulles

Au bout du chemin
Je prendrai ta main